Mise en ligne le : 24 décembre 2005
Les tensions croissantes autour du nucléaire iranien font
craindre un risque de nouvelle guerre au Moyen-Orient. Il importe que
la société civile mondiale se mobilise
à temps pour convaincre les dirigeants des Etats
placés en première ligne, l'Iran, les Etats-Unis
et Israël de résoudre cette crise pacifiquement,
par la voie diplomatique, d'écarter tout recours
à "l'option militaire" et à plus forte raison
à "l'option nucléaire" (emploi d'armes
nucléaires), évoquée par les
dirigeants américains. Les parlementaires, les responsables
d'associations, les personnalités sont invités
à signer cet appel.
APPEL DE PARLEMENTAIRES ET DE MEMBRES DE LA SOCIETE CIVILE AU SUJET DE
L'IRAN ET DES ARMES NUCLEAIRES
POUR UNE SOLUTION PACIFIQUE DE LA CRISE IRANIENNE ET UN MOYEN-ORIENT
SANS ARMES NUCLEAIRES
PAS DE "PREMIER EMPLOI" DES ARMES NUCLEAIRES
A
M. George W.Bush, Président des Etats-Unis
d'Amérique
Mme Condoleeza Rice, Secrétaire d'Etat
M. Donald Rumsfeld, Secrétaire à la
Défense
M. John Bolton, Ambassadeur auprès des Nations Unies
M. Ahmadinejad, Président de la République d'Iran
M. Kamal Jharze, Ministre des Affaires Etrangères
S.E. Zarif-Khonsari, Ambassadeur auprès des Nations Unies
M.Ariel Sharon, Premier Ministre d'Israel
M. Silvan Shalom, Ministre des Affaires Etrangères
S.E. Mr. Dan Gillerman, Ambassadeur auprès des Nations Unies
Cc
M. Jose Manuel Barroso, Président de la Commission
Européenne
M. Tony Blair, Premier Ministre du Royaume-Uni et président
en exercice du Conseil Européen
M. Jack Straw, Secretaire d'Etat aux Affaires Etrangères et
au Commonwealth
Son Honneur John Howard, Premier Ministre d'Australie
Son Honneur Alexander Downer, Ministre des Affaires
Etrangères d'Australie
M. Jacques Chirac, Président de la République
Française
M. Dominique de Villepin, Premier Ministre
M. Philippe Douste-Blazy, Ministre des Affaires Etrangères
M. Horst Köhler, Président de la
République fédérale d'Allemagne
Mme Angela Merkel, Chancelière de la République
fédérale d'Allemagne
Dr. Frank-Walter Steinmeier, Ministre des Affaires
Etrangères
M. Kofi Annan, Secrétaire Général des
Nations Unies
M. Mohamed ElBaradei, Directeur de l'AIEA
Messieurs les présidents Bush et Ahmadinejad, Mesdames et
Messieurs les présidents, premiers ministres, ministres des
affaires étrangères, secrétaires
d'Etat, secrétaires à la défense et
ambassadeurs,
La prolifération des armes nucléaires
représente peut-être la plus grande menace qui
pèse sur la civilisation. Si la prolifération en
cascade que l'on redoute se produit, la probabilité que des
armes nucléaires soient employées à un
moment ou à un autre par malveillance, folie, erreur de
calcul ou accident, augmentera d'une façon explosive. Il
incombe à toutes les nations de s'assurer que le nombre de
nations disposant d'armes nucléaires n'augmente pas,
d'empêcher que des acteurs non étatiques s'en
procurent, et à celles qui en possèdent
déjà de les éliminer
jusqu'à disparition.
Des menaces ou des rumeurs d'action militaire, voire d'emploi d'armes
nucléaires, ne peuvent qu'aggraver la crise montante entre
l'Iran, les Etats-Unis et Israël.
Fondées ou non, des informations évoquant la
préparation ou l'examen d'options militaires sont
extrêmement inquiétantes, et dangereuses par
elles-mêmes. De tels examens doivent cesser. On ne doit pas
entendre parler de guerre.
Or, on entend parler de guerre, tant du côté des
Etats-Unis que d'Israël. Quant à vous, M. le
Président Ahmadinejad, vous avez parlé de
“rayer Israël de la carte”. Aux Etats-Unis
et en Israël, des “têtes
chaudes” appellent ouvertement à une
“action militaire qui ne traîne pas”,
tandis que des dirigeants “responsables”
déclarent “qu'aucune option n'est
exclue”. M. le président Bush, nous avons entendu
employer ces deux formules quelques mois seulement avant l'invasion de
l'Irak. Nous demandons qu'on cesse immédiatement d'envisager
quelque option militaire ou nucléaire que ce soit, et nous
soutenons le directeur général de l'AIEA, M.
Mohamed ElBaradei, lorsqu'il appelle toutes les parties à
cesser désormais de tenir ce discours guerrier.
Les Etats-Unis, les autres Etats officiellement dotés
d'armes nucléaires et ceux qui le sont de facto -bref, les
nations qui possèdent déjà des armes
nucléaires- ont fait peu de progrès vers le but
fixé internationalement d'éliminer ces armes en
totalité et sans équivoque. Bien que quelques
progrès limités aient été
faits dans la réduction de l'ensemble des stocks d'armes
nucléaires, les Etats reconnus comme possesseurs d'armes
nucléaires continuent à faire reposer sur ces
armes leurs doctrines de sécurité et n'envisagent
pas de changer d'attitude « dans un avenir
prévisible ».
Cela continue malgré un consensus international manifeste
sur le fait que les armes nucléaires représentent
une menace permanente pour la civilisation et la vie, malgré
les appels répétés de la
communauté internationale à avancer vers leur
élimination totale et sans équivoque.
Des nations qui possèdent de vastes arsenaux
nucléaires ne peuvent pas sérieusement en appeler
d'autres à éliminer leurs propres arsenaux
nucléaires ou à renoncer à s'en
procurer, alors qu'elles-mêmes ne font pas un geste pour
éliminer les leurs. Un engagement mondial pour
l'élimination des armes nucléaires est un
engagement mondial à les éliminer, et vaut pour
toutes les parties. Il ne peut y avoir d'exceptions. Celles qui
possèdent actuellement des arsenaux nucléaires
sont tenues d'éliminer ces arsenaux. Celles qui n'en ont pas
ne doivent pas chercher à s'en procurer.
Pareillement, que l'une des parties viole l'objectif d'un Moyen-Orient
exempt de toute arme nucléaire n'excuse nullement sa
violation par une autre partie. Cependant, la renonciation de l'une des
parties à l'option nucléaire facilitera sa
renonciation par une autre partie. L'arsenal nucléaire
d'Israël comme la quête d'armes
nucléaires de la part de l'Iran - si elle a lieu
effectivement- sont dangereux en soi et ouvrent la porte à
une prolifération ultérieure parmi les nations du
Moyen-Orient et à une course aux armements qui seraient
extrêmement dangereuses. Cela ne doit pas se produire.
Il existe de sérieuses craintes dues au fait que la doctrine
nucléaire des Etats-Unis se permet d'envisager des frappes
contre d'autres nations, y compris en faisant usage en premier d'armes
nucléaires, éventuellement contre des nations qui
n'en ont pas elles-mêmes. Nous notons et approuvons
à ce sujet la récente lettre de
sénateurs américains et autres signataires.
L'emploi d'armes nucléaires pour la troisième
fois ne doit jamais avoir lieu. Il représenterait une
catastrophe non seulement pour l'Iran ou Israël, mais pour
toute la région et même pour le monde entier, du
fait de ses retombées radioactives, du chaos qu'il
produirait, et parce qu'il briserait le tabou qui s'est
imposé depuis 60 ans quant à l'emploi de telles
armes. Briser ce tabou pourrait entraîner d'autres emplois de
l'arme nucléaire, avec une barre placée de plus
en plus bas. L'usage banalisé d'armes nucléaires
serait catastrophique pour le monde. Nous pressons toutes les parties
de renoncer à se procurer des armes nucléaires et
d'adopter des politiques qui en bannissent l'emploi.
Les parlementaires, les organisations de la
société civile et les personnalités
soussignés recommandent instamment d'apporter à
la crise des relations entre les Etats-Unis et l'Iran, entre
Israël et l'Iran, une solution fondée sur les
principes clairement définis ci-après :
1) Aucun recours à aucune option militaire, par quelque
partie que ce soit, pour quelque raison que ce soit.
2) Engagement clair de toutes les parties ayant des armes
nucléaires de ne pas employer ces armes dans la
présente situation, et plus
généralement de respecter la doctrine de leur
non-emploi en premier
3) Application de la résolution du Traité de Non
Prolifération datant de 1995 sur la création
d'une zone exempte d'armes nucléaires au Moyen-Orient,
application des résolutions annuelles, adoptées
par consensus, de l'Assemblée Générale
de l'ONU sur « l'établissement d'une zone exempte
d'armes nucléaires dans la région du Moyen-Orient
», et en particulier complète application de la
résolution de cette année sur la
prolifération nucléaire au Moyen-Orient
4) Engagement clair de toutes les parties pour l'élimination
universelle des armes nucléaires, y compris en
réaffirmant la Déclaration Finale de la
Conférence de révision du Traité de
Non Prolifération de 2000, et les résolutions
correspondantes de l'Assemblée
Générale de l'ONU
5) Résolution par la voie diplomatique des tensions entre
les Etats-Unis, Israël et l'Iran, impliquant des compromis de
part et d'autre, la reconnaissance des préoccupations
légitimes de sécurité de toutes les
parties, dont Israël et l'Iran, et l'arrêt des
déclarations incendiaires ou de l'exploration d'options
militaires par quelque partie que ce soit.
Premiers
signataires